Le Collectif alerte sur un décret dangereux pour les plus précaires

Alors que la conjoncture économique se dégrade, dans un contexte marqué par l’intensification des risques structurels tels que l’automatisation des emplois, et que le taux de chômage augmente, le gouvernement choisit de durcir le régime de sanctions des demandeurs d’emploi.

Publié le 30 mai, un décret d’application de la loi plein emploi acte la création d’une nouvelle sanction, la « suspension-remobilisation », permettant à France Travail et aux départements de suspendre, en cas de manquement aux obligations du nouveau contrat d’engagement, jusqu’à 100 % de l’allocation chômage ou du Revenu de solidarité active (RSA) dès le premier niveau de sanction. Un délai de seulement 10 jours est laissé à la personne pour contester cette décision. L’objectif de cette réforme est clair : pouvoir sanctionner plus facilement et plus rapidement.

Après l’instauration de l’obligation de réaliser au moins 15 heures d’activités hebdomadaires obligatoires, ce décret constitue l’acte II d’une réforme qui fait porter sur les personnes la culpabilité de leur situation de privation d’emploi. 

C’est une réforme brutale, inhumaine et inefficace

Pour nos associations, rien ne justifie, ne serait-ce que de menacer, de priver intégralement une personne de ses ressources, déjà maigres (640 euros pour le RSA ; 1 100 euros pour le montant mensuel brut moyen des allocations chômage). Pour pouvoir se projeter dans l’avenir, les personnes concernées ont besoin de revenus stables, pas d’une épée de Damoclès en permanence au-dessus de la tête. Des familles, donc des enfants, vont être lourdement impactés par ces sanctions, à l’heure où la Délégation interministérielle à prévention et à la lutte contre la pauvreté affiche sa volonté d’agir contre la pauvreté infantile.

Ainsi, l’effet « remobilisateur » de telles sanctions ne s’appuie sur aucuns travaux scientifiques. Les études menées à l’étranger montrent même leur inefficacité en matière de lutte contre la pauvreté : les personnes tendent davantage à accepter des emplois plus précaires et à abandonner ou renoncer aux dispositifs d’aide sociale. Pour nos associations, le risque est bien de voir encore augmenter le non-recours à l’assurance chômage et au RSA, qui atteignent respectivement 30 % et 35 %.
En plus d’être inefficaces, ces sanctions seront contre productives. Elles feront plonger des personnes déjà en difficulté dans une extrême précarité, sans résoudre les véritables freins à l’emploi : problèmes de santé, absence de logement, précarité numérique, isolement, etc.

Une réforme qui fait l’unanimité contre elle

  • Le CNLE (Conseil National des Politiques de Lutte contre la Pauvreté) a alerté sur les risques d’aggravation de l’exclusion et demandé un moratoire quant à la parution du décret
  • De nombreux syndicats se joignent aux associations pour dénoncer le fait que les
  • devoirs supplantent le droit fondamental à un revenu et que la logique de sanction supplante celle de l’accompagnement.
  • Des scientifiques, et notamment des économistes, ont indiqué que ce décret, et la réforme dans laquelle il s’inscrit, servaient un projet politique et seraient inefficaces pour faire revenir à l’emploi les personnes qui en sont les plus éloignées.

Le Collectif ALERTE appelle à un sursaut de responsabilité

Nos associations regrettent qu’aucune de nos alertes et qu’aucune de nos demandes n’aient été entendues. Nous n’avons d’ailleurs été consultées sur ce projet de décret qu’une fois que celui-ci a été transmis au Conseil d’État pour validation.

  1. Nous demandons : un moratoire immédiat, dans l’attente d’une évaluation préalable et transparente. Avec ce nouveau régime de sanctions, c’est un véritable saut dans le vide que s’apprête à faire le gouvernement, sans qu’aucune évaluation des conséquences, pour les personnes les plus précaires dans notre pays, n’ait été réalisée.
  2. Une expérimentation limitée sur deux territoires pilotes avant toute généralisation.

Sanctionner la pauvreté n’a jamais permis de la réduire. Le Collectif ALERTE reste disponible pour travailler à l’élaboration d’une politique d’insertion juste, humaine et efficace.

Contacts presse :

Uniopss/ALERTE : Valérie Mercadal - 01 53 36 35 06 – vmercadal@uniopss.asso.fr
Uniopss/ALERTE : Charlotte Penot – 01 53 36 35 09 – cpenot@uniopss.asso.fr

 

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